07 avril 2014

Les Chiens errants

Pas facile à aimer le dernier film de Tsai Ming-Lian. C'est pourtant un très grand et très beau film.
Seulement voilà, il ne faut avoir peur ni de la nuit, ni de la pluie ni du silence. Il faut être capable de se laisser prendre, sans se lasser, à la beauté des images.


Les Chiens errants est un film très lent, avec des plans qui durent parfois interminablement. C'est un film quasi sans parole. Et il appartient au spectateur de reconstituer tant bien que mal l'histoire, celle d'un père et de ses deux enfants réduits à l'extrême misère. Dans le froid et le vent, il sert d'homme-sandwich pour des programmes immobiliers de luxe alors que sans ressource, il a trouvé refuge dans un coin de bâtiment abandonné et délabré. Pendant ce temps ses enfants traînent dans le supermarché pour récupérer des échantillons ou des aliments dont les dates sont dépassées.  De quoi assurer non pas leur vie mais leur survie. Une femme, dont on ne sait rien si ce n'est qu'elle s'en sort peut-être un peu mieux puisqu'elle travaille au supermarché, croise le chemin des enfants. Qui est-elle ? Pourquoi s'intéresse-t-elle à eux ? Entre elle, les enfants et leur père des liens se nouent, inévitablement, mais le réalisateur se contente de suggérer des possibles plus qu'il ne dit et n'explique.

Et c'est pour cela que j'ai aimé le film, qui montre toute la puissance des images. La longueur des plans permet au spectateur de littéralement entrer dans l'image, pour en repérer le moindre détail qui lui permettra de faire des hypothèse, d'imaginer, de s'interroger sur le sens de ce qu'il voit. De toute évidence Tsai Ming-Lian compte sur le pouvoir de suggestion de l'image ... et la patience du spectateur.


Le cinéma parce qu'il a la capacité de raconter des histoires, oublie parfois qu'il est avant tout un art visuel et se confond avec la littérature ou le théâtre. La littérature utiise des mots pour traduire des émotions. Le cinéma de Tsai Ming-Lian utilise des images. Presque exclusivement. Ce n'est pas pour autant du mime ou du cinéma muet façon The Artist. Les Chiens errants ?  un film qui, pour moi,  touche à l'essence même du cinéma.


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