10 avril 2018

Michael Farris Smith, Nulle part sur la terre


Deux êtres abîmés par la vie qui n'ont nulle part où aller si ce n'est la petite ville où ils ont grandi.

" C'était l'un de ces petites bourgades pittoresque du Sud qui auraient pu servir ou avaient peut-être déjà servi de décor de cinéma. De grandes maisons victoriennes. Des magnolias majestueux. Des réverbères fin de siècle. Des églises dont la flèche transperçait les nuages. Il passa devant un alignement de bicoques étroites. Une bleue, puis une jaune, puis une rose, puis une blanche. "

Une ville comme une carte postale, mais qui ne leur a pas porté chance ni à l'un, ni à l'autre.
Elle a connu le pire, en allant d'hommes en hommes; elle ne tient debout que parce qu'elle a une petite fille de 6 ans. Lui vient de passer 11 ans en prison, mais s'il a purgé sa peine, certains n'ont pas oublié et pensent que ce n'est pas assez.

Le roman de Michael Farris Smith est un roman ancré dans un territoire, le sud du Mississippi, autant que dans un milieu social. Il décrit ainsi, sans misérabilisme mais avec précision la vie de gens ordinaires dans une ville ordinaire, tout en ménageant suspens et rebondissements comme dans un polar. Mais ses personnages sont des êtres incarnés auxquels on s'attache rapidement, car s'ils ont commis et continuent de commettre des erreurs c'est surtout la vie, qui ne leur a pas été favorable.  Maben et Russel, inévitablement vont se rencontrer, mais comment deux êtres aussi marqués peuvent-ils s'apprivoiser?

"Dans les marais du  sud du Mississippi on peut regarder le monde s'éveiller quand les rayons d'or pâle du soleil s'immiscent entre les arbres et la mousse et les grues aux larges ailes. Les libellules bourdonnent et les ratons laveurs sortent de leur tanière et crapahutent le long des troncs d'arbres effondrés. Les tortues vont se percher sur les souches qu'inondent bientôt la chaleur du jour et mille autres créatures cachées frétillent sous les eaux noires, armées d'une patience et d'une agilité meurtrière. Des branchages accablés par le temps, incapables de soutenir leur propre masse, ploient et se brisent tels des vieillards se résignant à rejoindre leur tombeaux marécageux. Les reptiles ondoient et les merles criaillent dans le paysages zébré par la lumière de l'aube venue prendre la relève de la nuit profonde et paisible. "

 Chez Michael Farris Smith, les descriptions sont d'autant plus évocatrices qu'elles sont aussi métaphoriques : l'ambiguïté de la nature, à la fois paisible et meurtrière, sombre et ensoleillée est aussi celle de l'humanité. 






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